samedi 6 décembre 2008

Regrets éparpillés

Photo IsaT

La vie m'a éloignée du fleuve.
Pourtant, à chaque fois que j'y reviens,
une bouffée de tristesse et de douceur
m'envahit.
Je dois repartir et je voudrais rester un peu,
le temps de croiser ce regard familier
et distant.
Il ne dit rien mais je crois deviner.
Je voudrais m'arrêter,
écouter ce qu'il ne me dit plus.
Mais le temps a passé.
Ma muse est devenue fantôme.
Les souvenirs pâlissent.
Mon amour est intact pourtant.
Même si ma vie est ailleurs.
Peut-être. Peut-être pas.

On dirait que le fleuve traverse un champ de ruines...

samedi 23 août 2008

Vous m'avez dit


(Pour Gilles)
Vous m'avez dit, tel soir, des paroles si belles
Que sans doute les fleurs, qui se penchaient vers nous,
Soudain nous ont aimés et que l'une d'entre elles,
Pour nous toucher tous deux, tomba sur nos genoux.

Vous me parliez des temps prochains où nos années,
Comme des fruits trop mûrs, se laisseraient cueillir ;
Comment éclaterait le glas des destinées,
Comment on s'aimerait, en se sentant vieillir.

Votre voix m'enlaçait comme une chère étreinte,
Et votre coeur brûlait si tranquillement beau
Qu'en ce moment, j'aurais pu voir s'ouvrir sans crainte
Les tortueux chemins qui vont vers le tombeau.
Emile Verhaeren, Les heures d'après-midi (1905)

lundi 18 août 2008

Je t'aime tant

Photo IsaT


Mon sombre amour d'orange amère
Ma chanson d'écluse et de vent
Mon quartier d'ombre où vient rêvant
Mourir la mer

Mon beau mois d'août dont le ciel pleut
Des étoiles sur les monts calmes
Ma songerie aux murs de palme
Où l'air est bleu

Mes bras d'or mes faibles merveilles
Renaissent ma soif et ma faim
Collier collier des soirs sans fin
Où le cœur veille

Est-ce qu'on sait ce qui se passe ?
C'est peut-être bien ce tantôt
Que l'on jettera le manteau
Dessus ma face

Coupez ma gorge et les pivoines
Vite apportez mon vin mon sang
Pour lui plaire comme en passant
Font les avoines

Il me reste si peu de temps
Pour aller au bout de moi-même
Et pour crier Dieu que je t'aime
Je t'aime tant, je t'aime tant



Louis Aragon

dimanche 3 août 2008

Merci

Merci au passant fidèle qui vient presque tous les jours du nord de ce petit royaume prendre des nouvelles de Myrtille. Il a choisi de rester dans l'ombre et c'est évidemment son droit. Mais Myrtille est curieuse...

Ecueils



Je voudrais croire
Je voudrais rêver
Ecrire cette histoire
L’empêcher de couler

Mais mes rêves se brisent
Sur les écueils de toujours

Lui au fond de moi
Son corps seulement
Si familier et si lointain

Instants volés
A son autre vie
A son autre femme

Je ne demande plus
Je prends parfois
Mais refuse souvent
Engourdie, malmenée

Mirages incertains
D'un instant d'abandon
D'un carré de soleil
Echappé des nuages

Mais le temps surtout
Le temps de penser
Le temps de rêver
A d’autres rivages

A d’autres voyages

Au bord du vide
De cette nuit sans rêve
Je me retourne sans cesse
Sur le voile de ma vie

Une nuit sans lune
Un ciel sans étoiles
Un amour sans rêve
Une vie sans toi
Je ne peux pas

Ta voix me guide
De plus en plus lointaine
C'est la distance hélas
Qui la rend plus douce.

mercredi 16 juillet 2008

Gérard Philippe et Suzanne Flon (1959)

Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées; le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière; et on se dit: "J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui."
Perdican dans "On ne badine pas avec l'amour"
Alfred de Musset (1834) Acte II Scène V

samedi 28 juin 2008

Comme une étoile au fond d'un trou...


(…)

Tout se perd et rien ne vous touche
Ni mes paroles ni mes mains
Et vous passez votre chemin
Sans savoir ce que dit ma bouche

Votre enfer est pourtant le mien
Nous vivons sous le même règne
Et lorsque vous saignez je saigne
Et je meurs dans vos mêmes liens

Quelle heure est-il quel temps fait-il
J'aurais tant aimé cependant
Gagner pour vous pour moi perdant
Avoir été peut-être utile

C'est un rêve modeste et fou
Il aurait mieux valu le taire
Vous me mettrez avec en terre
Comme une étoile au fond d'un trou

Extrait de “les poètes” Louis Aragon

mardi 17 juin 2008

Sous la lune noire

Edvard Munch - Madonnas ansikt - 1894



Sous la lune noire de mes amours déchues
ce qui n’a pas été ou peut-être si peu
était enterré là sous un amas d’ordures.

Oubliée du monde et du regard des hommes
je marche sans effort jusqu’au bout de ma vie
je n’ai plus rien à perdre ni plus rien à gagner.

Notre histoire a fini sans avoir commencé
et mon amour vivra même dans le coeur éteint
de ce corps qu’on brûlera sous la coupole cuivrée.

jeudi 12 juin 2008

Lignes de fuite - photo IsaT

lundi 9 juin 2008

Au bord du fleuve

La nuit tombe doucement
avec le chant du merle
et ce gros ballon rouge
qui plonge à l'horizon.

J'ai oublié la ville
ses rumeurs, ses alarmes
et, pour ce soir encore
le fleuve est loin d'ici

Je cherche ses reflets
quand je ferme les yeux
et je te vois aussi
marcher tout près de lui.

samedi 7 juin 2008

Un parfum d'errance...

Hommage à Delvaux - Photo IsaT

jeudi 5 juin 2008

Il regarde le monde

Reflets du monde - photo IsaT

vendredi 23 mai 2008

Elle se refuse toujours

Tourments sur fond bleu - Photo IsaT


Elle se refuse toujours à comprendre, à entendre,
Elle rit pour cacher sa terreur d'elle-même.
Elle a toujours marché sous les arches des nuits
Et partout où elle a passé
Elle a laissé
L'empreinte des choses brisées.


Paul Eluard - Extrait VIII de "Les petits justes"
Capitale de la douleur (1926)

mercredi 14 mai 2008

Le ruisseau

Asger Jorn


Beaucoup d'eau a passé sous les ponts
et puis aussi énormément de sang
Mais aux pieds de l'amour
coule un grand ruisseau blanc
Et dans les jardins de la lune
où tous les jours c'est ta fête
ce ruisseau chante en dormant
Et cette lune c'est ma tête
où tourne un grand soleil bleu
Et ce soleil c'est tes yeux

Jacques Prévert - Histoires

Chanson du mois de mai




L'âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L'âne de faim
Le roi d'ennui
Et moi d'amour

Un doigt de craie
Sur l'ardoise des jours
Trace nos noms
Et le vent dans les peupliers
Ane Roi Homme

Soleil de chiffon noir
Déjà nos noms sont effacés
Eau fraîche des Herbages
Sable des Sabliers
Rose du Rosier rouge
Chemin des Ecoliers

L'âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L'âne de faim
Le roi d'ennui
Et moi d'amour
Au mois de mai

La vie est une cerise
La mort est un noyau
L'amour un cerisier.

Jacques Prévert - Histoires

dimanche 11 mai 2008

Affinités communautaires

Jean Tinguely - L'Ecolo (1987)


L'électrogène radicasse est un instrument à multiplastres microfins qui tient dans une boîte à zouailles. I1 sert à mesurer la maboulie chez les Zigomestres de droit macaronique. Le Haut Virginaire à qui il est confié, grâce à ses ascendances macrobates, ne peut ambivaler l'appareil mignonnet qu'au moment où l'un des mestres zigos extrapose sa lamprenelle tangible.

Hélas ! Le Haut Virginaire, un peu croulant, a toujours quelques crêpons de retard sur la détection psychochronique. Dom Flac et Mac Doll avaient beau cybernétiquer, il fallait regueuler pendant que le migronnet sur le vif, par dépit autonomiaque, cracouillait le nécrate pigatif.

Le Sinistre de la justice, en ayant marre, mit un filin à tant d'obstrusie. Il espeya d'un geste, plein de prestance la partie haute du Virginaire. Celui-ci croula pour de bon.

Depuis lors, par ocquetroi, les Zigomestres ont fondé la Clique des Gouailles et expansent parmi le peuple souverain le fabuleux électrogène radicasse qui pèle la poire en un clin d'ouille et calmate les zozos des hypocons et des dryaques.

Paul Dewalhens
Extrait de "Cymballum Mundi"

vendredi 9 mai 2008

Lui

Félicien Rops - Pornokrates


Il est temps de partir, de fermer la porte sur ce théâtre absurde. Qu'ils s'amusent sans moi. Je n'arrête pas de partir. Dans la cour de récréation, nous disions "deux! deux!"... Mais là, on n'arrête pas, on s'acharne... on n'a pas assez du spectacle de la défaite, il faut voir le cadavre, s'en repaître. Retour à l'âge des cavernes, à l'obscurantisme. Elle a forcément raison, toujours. On ne doit pas réfléchir et on ne se trompe jamais. On attend l'inspiration divine et on assassine avec le sourire.

Je pense à la gravure de Rops, la femme aux yeux bandés, qui tient un cochon en laisse. Elle, c'est le cochon qui la mène.

Mon amant me regarde pleurer. Me serre dans ses bras. Il essuie mes larmes. La politique ne l'intéresse pas. Il serait pathétique de le convertir. Qu'il garde seulement sa place. Sa place unique. Celle de l'homme qui regarde la femme que je suis. Qui la prend. Qui la préserve. Qui la nourrit.

Mon refuge. Ma source. Ma force. C'est toi que je devrais aimer.

lundi 5 mai 2008

Solitudes

La ville est silencieuse.
Plus loin du fleuve
une chambre

Sa pâle lumière
s'échappe de la fenêtre entrouverte
sur d'improbables amours...

dimanche 4 mai 2008

Le ciel est, par dessus le toit...

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si beau, si calme!
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.

La cloche, dans le ciel qu'on voit,
Doucement tinte,
Un oiseau sur l'arbre qu'on voit,
Chante sa plainte.

Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.

Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse?

Paul Verlaine (Sagesse - 1881)
Reflets croisés - photo IsaT


Sérénité à deux - Photo IsaT


dimanche 20 avril 2008

Enivrez-vous

S. Dali - Montre molle au moment de sa première explosion


Il faut être toujours ivre.
Tout est là:
c'est l'unique question.
Pour ne pas sentir
l'horrible fardeau du Temps
qui brise vos épaules
et vous penche vers la terre,
il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi?
De vin, de poésie, ou de vertu, à votre guise.
Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois,
sur les marches d'un palais,
sur l'herbe verte d'un fossé,
dans la solitude morne de votre chambre,
vous vous réveillez,
l'ivresse déjà diminuée ou disparue,
demandez au vent,
à la vague,
à l'étoile,
à l'oiseau,
à l'horloge,
à tout ce qui fuit,
à tout ce qui gémit,
à tout ce qui roule,
à tout ce qui chante,
à tout ce qui parle,
demandez quelle heure il est;
et le vent,
la vague,
l'étoile,
l'oiseau,
l'horloge,
vous répondront:
"Il est l'heure de s'enivrer!
Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps,
enivrez-vous;
enivrez-vous sans cesse!
De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise."

Charles Baudelaire

jeudi 17 avril 2008

Une parole entendue...

la plus belle arche et qui est un jet de sang
la plus belle arche et qui est un cerne lilas
la plus belle arche et qui s'appelle la nuit
et la beauté anarchiste de tes bras mis en croix
et la beauté eucharistique qui flambe de ton sexe
au nom duquel je saluais le barrage de mes
lèvres violentes

Aimé Césaire
25 juin 1913 - 17 avril 2008


"Aimé Césaire est un Noir qui est non seulement un Noir; mais tout l'homme, qui en exprime toutes les interrogations, toutes les angoisses, tous les espoirs et toutes les extases, et qui s'imposera de plus en plus à moi comme le prototype de la dignité"

André Breton

dimanche 13 avril 2008

Mon Expo 58 à moi...

Je voudrais me tenir à l'écart de toutes ces manifestations commémoratives des 50 ans de l'Expo 58. Elles sont tellement éloignées de mes souvenirs d'enfance. Est-ce transmissible? Nous avons fait tant de fois le tour du monde pendant ces six mois d'expo.

Laterna Magika - photo Josef Svoboda - 1958

En pleine guerre froide, nous avons découvert la Laterna Magika au pavillon tchèque.
L'adulte que je suis a su entre-temps que, dans cette équipe de mise en scène, se trouvait un jeune homme nommé Milos Forman.

Il y avait aussi les marionnettes de Trnka. J'avais de la chance. Mes parents avaient fait leur voyage de noce à Prague en 1952. Ils avaient un faible pour cette ville et nous avons donc passé beaucoup de temps au pavillon tchèque. Ils avaient aussi, mon père surtout, une sympathie particulière pour les artistes subversifs de l'Est comme pour les démocraties nordiques.

La Main - Jiri Trnka - 1965

J'ai vu aussi une réplique du Spoutnik II, ce vaisseau dans lequel on avait envoyé la pauvre Laïka, morte asphyxiée en orbite terrestre en août 58.

Dans genre différent, il y avait aussi cette visite d'une "banane volante". Je n'ai jamais compris la spécificité de cet engin tant utilisé à l'époque, notamment dans la guerre d'Algérie. Mes yeux d'enfant retiennent que c'était un super hélico, encore plus impressionnant que les Sikorsky de l'Allée Verte et qui faisait encore plus de bruit puisqu'il avait deux rotors au lieu d'un...

Plaine de jeux, cheval Bayard et télésiège au dessus des pièces d'eau, étoiles lumineuses et Atomium bien sûr... Tout cela était comme un conte de fée.


Mais ce n'était rien à côté de la Belgique miniature en dessous de la passerelle de la flèche du génie civil. Il fallait que j'y retourne à chaque fois. Du haut de mes 3 ans 1/2, je repérais avec mon père le parcours de l'autostrade qui menait à la mer.


Des années après la fermeture de l'Expo j'y retournais encore, assistant impuissante à sa lente disparition, jusqu'à la destruction de la flèche dans les années 70.

samedi 12 avril 2008

La porte entrebaillée



Je m'appuie
J'ai envie
Ne pas avoir peur
Devant toi
Etre nue
Vraiment moi
L'enfance, la blessure
Toi qui paie
T'as rien fait
Pour ça

Ouvrir
Vivre
Respirer
Oser
La vie
Et le temps presse

Ivresse
Oubli
Envie
De toi, pour toi
Pour nous
Pour moi

Reste
J'ai peur
Toi aussi, je sais

Mais
Mon frère
Mon enfant

A deux
On est plus fort
Que tout seul

C'est bête
Je t'aime
J'y peux rien.

Un petit coin d'enfance...


Il y a 50 ans, tout le monde se préparait à cet immense événement de l'après-guerre qu'était l'ouverture de l'Expo 58. Pendant qu'on construisait là-bas, on détruisait la ville. Mais à l'époque, je ne le savais pas encore.



Comme tous les samedis, je passais sur le viaduc et je regardais fascinée les Sikorsky de la Sabena stationner et même, si j'avais un peu de chance, décoller ou atterrir sur l'héliport de l'Allée Verte, en face de chez Citroën. Quelle chance aussi que mon père ait choisi cette marque de voiture. J'avais ainsi d'autres occasion de voir ces hélicoptères qui me fascinaient tant au point que j'en rêvais la nuit.



Nous allions à la mer, chez mes grands parents, empruntant cette nouvelle autostrade qui soulageait mon mal des transports mais me privait de mes repères habituels, comme cette belle petite ville d'Eeklo que nous traversions autrefois par "l'ancienne route" qui prenait tellement plus de temps.

Il y avait à Eeklo une façade ou un pignon de bâtiment avec, si je me souviens bien, des statues d'anges. C'était curieux et fascinant pour la toute petite fille que j'étais. Je n'ai pas retrouvé de trace de ce lieu depuis.

A l'époque, mes parents allaient me chercher à l'école le samedi midi et j'embarquais dans la deux chevaux familiale pour des heures de trajet et un court week-end à la mer auprès de ma grand-mère dont la gaité a éclairé mon enfance.

dimanche 16 mars 2008

Matière première

Alechinsky - Astre et désastre - 1969

Mots
mots immortels
de cil de ficelle de poudre de sel et de fleur
humides mauves vermoulus pâles et carnivores
mots de cire rouge et de larmes
de baisers et de flambeaux de Judas
pointus têtus nerveux obtus ventrus et lourds
mots de la fin mots de la rime
aux accouplements dangereux
aux liaisons faciles
aux maladies incurables
mots lapsus malades de la peste
monumentaux et orgueilleux
aux bijoux de fautes d'orthographe
mots criminels et purs
décapités sur l'échafaud de la censure
mots mes bons camarades d'orgie
des nuits de neige et de plume.
mots torturés au lance-flammes
mots à la taille de gazelle
à l'épiderme de velours rouge
aux jambages de french cancan
à la silhouette fuyante de marlou
mots qui portez chapeau melon
cachés dans les pianos et les trompettes de jazz
mots tabourets
qui êtes une injure permanente et gratuite
mots de perdition et de déraillement
de Babel de carnaval et d'hiéroglyphe
mots qui faites à présent l'amour

stylets de la durée exacte
amulettes et chiffres d'or
maîtres magiques des objets
serpents de la dialectique
mots créateurs brûlants qui nous livrez le monde
croissez multipliez plus cruels et plus forts.

Achille Chavée, "D'ombre et de sang"


mardi 4 mars 2008

Eclipse

Eclipse du 3 mars 2007


J'ai beau dire et beau faire
Mais le temps a passé
Je marche solitaire
Dans nos pas effacés
Et le regret d'hier
M'empêche d'avancer.

Oh! je voudrais tant que tu te souviennes
Des jours heureux où nous étions amis
En ce temps-là la vie était plus belle,
Et le soleil plus brûlant qu'aujourd'hui
.




dimanche 17 février 2008

A Patrick

P.S.Krøyer: Eftermiddagssol og havblik,1899, Johannes Larsen museum


Jeg elsker øer

- Fordi de tvinger os til at rejse
fordi de får vores opbrud
til at minde om ankomster.
Henrik Nordbrandt

mardi 12 février 2008

L'ombre

Alberto Giacometti - L'homme qui marche - 1960



Je marchais en silence
A quelques pas derrière
Son ombre solitaire
Je n'ai pas pu crier
Courir, la rattraper

Je n'ai su que me taire
La regarder au loin
Marcher et disparaître
Le ventre déchiré
Et le coeur à l'envers.

mardi 29 janvier 2008

Attendre

Photo S. Henrichsen

Je ne suis pas à toi,
Je ne suis à personne

Il y a tous ces silences
Ces peurs accumulées
De trop de solitude
Et de regrets épars

Le miroir de nos songes
N’est que le bruit de l’eau
En dessous de la glace

Et nous devrons attendre
Que le printemps l’efface

mardi 22 janvier 2008

Le Phoenix

Le premier matin - Photo IsaT


Je suis le dernier sur ta route
Le dernier printemps la dernière neige
Le dernier combat pour ne pas mourir

Et nous voici plus bas et plus haut que jamais.

Il y a de tout dans notre bûcher
Des pommes de pin des sarments
Mais aussi des fleurs plus fortes que l'eau

De la boue et de la rosée,

La flamme est sous nos pieds la flamme nous couronne
A nos pieds des insectes des oiseaux des hommes
Vont s'envoler

Ceux qui volent vont se poser.

Le ciel est clair la terre est sombre
Mais la fumée s'en va au ciel
Le ciel a perdu tous ses feux

La flamme est restée sur la terre

La flamme est la nuée du coeur
Et toutes les branches du sang
Elle chante notre air

Elle dissipe la buée de notre hiver.

Nocturne et en horreur a flambé le chagrin
Les cendres ont fleuri en joie et en beauté
Nous tournons toujours le dos au couchant

Tout a la couleur de l'aurore.


Paul Eluard



lundi 21 janvier 2008

Elle s'en va

La petite fille est assise au bord de l'abîme. Elle regarde le néant avec curiosité. Mais il n'y a rien à voir. Ni en haut, ni en bas, ni devant. Pas de lune, pas d'étoiles, pas de tunnel blanc, rien. Pas cette béatitude qui certains lui ont décrite. Personne ne l'attend. Personne. Ce n'est pas effrayant. Juste terriblement triste. Mais la petite fille ne pleure pas. Elle a épuisé toutes ses larmes sur la route. Derrière elle, seulement quelques lumières brillent dans la pénombre. Si elle arrive à fixer l'une d'elle, un souvenir lointain lui revient en mémoire. 
Il lui semble pourtant qu'une voix l'appelle, très loin derrière. Quelque chose lui semble familier dans cet appel. Mais elle n'arrive ni à le comprendre ni à le reconnaître.

Elle est assise au bord du lit. Immobile, fragile, si vieille tout d'un coup. Ses yeux semblent regarder au loin. Maman? Elle ne m'a pas vue entrer dans la chambre. Elle ne m'entend plus. 
J'ai souvent pensé à cet instant. Et je sais que cette fois, je ne peux plus rien faire pour la retenir. J'espère qu'elle sait que je lui ai pardonné.


samedi 19 janvier 2008

Rêve de bronze

"Bli bare sittende" - Per Ung
Photo IsaT

samedi 5 janvier 2008

Invitation au voyage

Ved Hankø - Photo S. Henrichsen


Partir, fuir cette aube grise ...
Fuir la paresse du soleil qui ne se lève plus,
le ciel qui chiale à n'en plus finir.
Ce n'est même plus l'hiver.
Partir, chercher la lumière, l'amour,
l'étreinte de nos corps,
la chaleur de nos rêves...
Sentir ta tête entre mes seins, ton souffle paisible et chaud.
Sentir ton coeur battre contre le mien.
Partir, ne plus penser.
Oublier toute le reste un instant
et pour l'éternité.
Viens... Allons-nous en!

mardi 1 janvier 2008

Blinkende lygter

Photo IsaT


I barndommens lange og dunkle nat,
brænder små blinkende lygter.
Som spor af erindringen efterladt,
mens hjertet fryser og flygter.

Her lyser din vildsomme kærlighed,
fortabt gennem tågede nætter,
og alt hvad du siden elsked og led,
har grænser som viljen sætter.

Den første sorg har et spinkelt skær,
som en tåre der skælver i rummet.
Kun den vil være dit hjerte nær,
når al anden sorg er forstummet.

Højt som en stjerne en vårlig nat,
brænder din barnlige lykke.
Du søgte den siden, men fik kun fat,
dens flakkende sensommerskygge.

Din tro du tog med dig så langt af led,
for det var det første og sidste.
Nu står den og brænder i mørket et sted,
og der er ikke mere at miste.

Og en eller anden kommer dig nær,
men kan aldrig helt forstå dig.
For dit liv har du lagt under lygternes skær,
og ingen skal siden nå dig.

Tove Ditlevsen
1947

On peut toujours rêver...

Pour que la violence ne soit plus la principale cause de mortalité des femmes dans le monde, pour qu'elles cessent d'être mutilées, lapidées, méprisés et harcelées, pour que la presse soit libre et indépendante, pour que les enfants ne jouent plus à la guerre ou n'explosent pas sur des mines, pour qu'il y ait encore demain des oiseaux, des abeilles, des ours polaires et une banquise, pour le partage des richesses, pour tous les combats de demain qui serviront à la dignité de tous, pour que dans tes yeux je lise encore que nous serons toujours là l'un pour l'autre, pour être celle que tu aimes regarder et prendre dans tes bras, pour ton sourire, pour toi, cette année encore, je continuerai à me battre ...

Belle année 2008 à toutes et tous!