samedi 23 août 2008

Vous m'avez dit


(Pour Gilles)
Vous m'avez dit, tel soir, des paroles si belles
Que sans doute les fleurs, qui se penchaient vers nous,
Soudain nous ont aimés et que l'une d'entre elles,
Pour nous toucher tous deux, tomba sur nos genoux.

Vous me parliez des temps prochains où nos années,
Comme des fruits trop mûrs, se laisseraient cueillir ;
Comment éclaterait le glas des destinées,
Comment on s'aimerait, en se sentant vieillir.

Votre voix m'enlaçait comme une chère étreinte,
Et votre coeur brûlait si tranquillement beau
Qu'en ce moment, j'aurais pu voir s'ouvrir sans crainte
Les tortueux chemins qui vont vers le tombeau.
Emile Verhaeren, Les heures d'après-midi (1905)

lundi 18 août 2008

Je t'aime tant

Photo IsaT


Mon sombre amour d'orange amère
Ma chanson d'écluse et de vent
Mon quartier d'ombre où vient rêvant
Mourir la mer

Mon beau mois d'août dont le ciel pleut
Des étoiles sur les monts calmes
Ma songerie aux murs de palme
Où l'air est bleu

Mes bras d'or mes faibles merveilles
Renaissent ma soif et ma faim
Collier collier des soirs sans fin
Où le cœur veille

Est-ce qu'on sait ce qui se passe ?
C'est peut-être bien ce tantôt
Que l'on jettera le manteau
Dessus ma face

Coupez ma gorge et les pivoines
Vite apportez mon vin mon sang
Pour lui plaire comme en passant
Font les avoines

Il me reste si peu de temps
Pour aller au bout de moi-même
Et pour crier Dieu que je t'aime
Je t'aime tant, je t'aime tant



Louis Aragon

dimanche 3 août 2008

Merci

Merci au passant fidèle qui vient presque tous les jours du nord de ce petit royaume prendre des nouvelles de Myrtille. Il a choisi de rester dans l'ombre et c'est évidemment son droit. Mais Myrtille est curieuse...

Ecueils



Je voudrais croire
Je voudrais rêver
Ecrire cette histoire
L’empêcher de couler

Mais mes rêves se brisent
Sur les écueils de toujours

Lui au fond de moi
Son corps seulement
Si familier et si lointain

Instants volés
A son autre vie
A son autre femme

Je ne demande plus
Je prends parfois
Mais refuse souvent
Engourdie, malmenée

Mirages incertains
D'un instant d'abandon
D'un carré de soleil
Echappé des nuages

Mais le temps surtout
Le temps de penser
Le temps de rêver
A d’autres rivages

A d’autres voyages

Au bord du vide
De cette nuit sans rêve
Je me retourne sans cesse
Sur le voile de ma vie

Une nuit sans lune
Un ciel sans étoiles
Un amour sans rêve
Une vie sans toi
Je ne peux pas

Ta voix me guide
De plus en plus lointaine
C'est la distance hélas
Qui la rend plus douce.