vendredi 23 mai 2008

Elle se refuse toujours

Tourments sur fond bleu - Photo IsaT


Elle se refuse toujours à comprendre, à entendre,
Elle rit pour cacher sa terreur d'elle-même.
Elle a toujours marché sous les arches des nuits
Et partout où elle a passé
Elle a laissé
L'empreinte des choses brisées.


Paul Eluard - Extrait VIII de "Les petits justes"
Capitale de la douleur (1926)

mercredi 14 mai 2008

Le ruisseau

Asger Jorn


Beaucoup d'eau a passé sous les ponts
et puis aussi énormément de sang
Mais aux pieds de l'amour
coule un grand ruisseau blanc
Et dans les jardins de la lune
où tous les jours c'est ta fête
ce ruisseau chante en dormant
Et cette lune c'est ma tête
où tourne un grand soleil bleu
Et ce soleil c'est tes yeux

Jacques Prévert - Histoires

Chanson du mois de mai




L'âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L'âne de faim
Le roi d'ennui
Et moi d'amour

Un doigt de craie
Sur l'ardoise des jours
Trace nos noms
Et le vent dans les peupliers
Ane Roi Homme

Soleil de chiffon noir
Déjà nos noms sont effacés
Eau fraîche des Herbages
Sable des Sabliers
Rose du Rosier rouge
Chemin des Ecoliers

L'âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L'âne de faim
Le roi d'ennui
Et moi d'amour
Au mois de mai

La vie est une cerise
La mort est un noyau
L'amour un cerisier.

Jacques Prévert - Histoires

dimanche 11 mai 2008

Affinités communautaires

Jean Tinguely - L'Ecolo (1987)


L'électrogène radicasse est un instrument à multiplastres microfins qui tient dans une boîte à zouailles. I1 sert à mesurer la maboulie chez les Zigomestres de droit macaronique. Le Haut Virginaire à qui il est confié, grâce à ses ascendances macrobates, ne peut ambivaler l'appareil mignonnet qu'au moment où l'un des mestres zigos extrapose sa lamprenelle tangible.

Hélas ! Le Haut Virginaire, un peu croulant, a toujours quelques crêpons de retard sur la détection psychochronique. Dom Flac et Mac Doll avaient beau cybernétiquer, il fallait regueuler pendant que le migronnet sur le vif, par dépit autonomiaque, cracouillait le nécrate pigatif.

Le Sinistre de la justice, en ayant marre, mit un filin à tant d'obstrusie. Il espeya d'un geste, plein de prestance la partie haute du Virginaire. Celui-ci croula pour de bon.

Depuis lors, par ocquetroi, les Zigomestres ont fondé la Clique des Gouailles et expansent parmi le peuple souverain le fabuleux électrogène radicasse qui pèle la poire en un clin d'ouille et calmate les zozos des hypocons et des dryaques.

Paul Dewalhens
Extrait de "Cymballum Mundi"

vendredi 9 mai 2008

Lui

Félicien Rops - Pornokrates


Il est temps de partir, de fermer la porte sur ce théâtre absurde. Qu'ils s'amusent sans moi. Je n'arrête pas de partir. Dans la cour de récréation, nous disions "deux! deux!"... Mais là, on n'arrête pas, on s'acharne... on n'a pas assez du spectacle de la défaite, il faut voir le cadavre, s'en repaître. Retour à l'âge des cavernes, à l'obscurantisme. Elle a forcément raison, toujours. On ne doit pas réfléchir et on ne se trompe jamais. On attend l'inspiration divine et on assassine avec le sourire.

Je pense à la gravure de Rops, la femme aux yeux bandés, qui tient un cochon en laisse. Elle, c'est le cochon qui la mène.

Mon amant me regarde pleurer. Me serre dans ses bras. Il essuie mes larmes. La politique ne l'intéresse pas. Il serait pathétique de le convertir. Qu'il garde seulement sa place. Sa place unique. Celle de l'homme qui regarde la femme que je suis. Qui la prend. Qui la préserve. Qui la nourrit.

Mon refuge. Ma source. Ma force. C'est toi que je devrais aimer.

lundi 5 mai 2008

Solitudes

La ville est silencieuse.
Plus loin du fleuve
une chambre

Sa pâle lumière
s'échappe de la fenêtre entrouverte
sur d'improbables amours...

dimanche 4 mai 2008

Le ciel est, par dessus le toit...

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si beau, si calme!
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.

La cloche, dans le ciel qu'on voit,
Doucement tinte,
Un oiseau sur l'arbre qu'on voit,
Chante sa plainte.

Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.

Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse?

Paul Verlaine (Sagesse - 1881)
Reflets croisés - photo IsaT


Sérénité à deux - Photo IsaT