mardi 28 août 2007

Nocturne


Passagère indécise
Clandestine et soumise

Captive
De rêves insensés
De voyages imaginaires

Ombre vacillante
Fragile
Dans l’ombre de tes nuits

Je danse
Sur un rayon de lune.


lundi 20 août 2007

Cette blessure

Gustav Klimt
Demi-nu recroquevillé, 1912-1913.

Cette blessure
Où meurt la mer comme un chagrin de chair
Où va la vie germer dans le désert
Qui fait de sang la blancheur des berceaux
Qui se referme au marbre du tombeau
Cette blessure d'où je viens

Cette blessure
Où va ma lèvre à l'aube de l'amour
Où bat ta fièvre un peu comme un tambour
D'où part ta vigne en y pressant des doigts
D'où vient le cri le même chaque fois
Cette blessure d'où tu viens

Cette blessure
Qui se referme à l'orée de l'ennui
Comme une cicatrice de la nuit
Et qui n'en finit pas de se rouvrir
Sous des larmes qu'affile le désir

Cette blessure
Comme un soleil sur la mélancolie
Comme un jardin qu'on n'ouvre que la nuit
Comme un parfum qui traîne à la marée
Comme un sourire sur ma destinée
Cette blessure d'où je viens

Cette blessure
Drapée de soie sous son triangle noir
Où vont des géomètres de hasard
Bâtir de rien des chagrins assistés
En y creusant parfois pour le péché
Cette blessure d'où tu viens

Cette blessure
Qu'on voudrait coudre au milieu du désir
Comme une couture sur le plaisir
Qu'on voudrait voir se fermer à jamais
Comme une porte ouverte sur la mort

Cette blessure dont je meurs.
Léo Ferré
(24 août 1916 - 14 juillet 1993)

jeudi 16 août 2007

Labyrinthe



L'envie m'est passée de me perdre encore dans le dédale de ce labyrinthe où, tant de fois déjà, la flamme vacillante de ma bougie n’a éclairé que des ombres fugitives et lointaines.

Je voudrais retrouver le plaisir de la vie simple, lumineuse et tranquille comme un sourire, douce et légère comme un baiser sous la pluie.

"We gonna go down, down, on new roads of happiness
And leave it all behind
We gonna go down, down, on broad streets of gladness
We'll change the wrong to right, turn it upside down."

(From "Go Down" by Perry Rose - album Hocus Pocus)



samedi 11 août 2007

Indigeste

Fred Lebain, Cactus, 2004-2005.


J'aurais voulu écrire un autre texte

Il y avait du soleil et du vin blanc,
une belle femme,
beaucoup d'amour, l'infini,
et des coquelicots rouges.

C'était une belle rencontre.

Mais il fait déjà nuit, le ciel est lourd et noir.
Il n'y a pas d'étoiles.
J'ai la gorge nouée:
le cactus que j'ai avalé m'a gâché ma soirée.

jeudi 9 août 2007

Des milliers de baisers perdus

Camille Claudel
La Valse (1889)


Tous nos baisers ont une histoire
Un mouvement et un savoir.
Chaleur de peau, douceur des lèvres
Tous nos baisers ont eu la fièvre.
Baisers volés, baisers voyous
Aux coins des yeux ou dans le cou,
Baisers ratés, baisers charmeurs
Baisers glacés, baisers menteurs.

Peut-être des centaines, peut-être des milliers
Sûrement des milliards de baisers perdus
Comme des âmes en peine, quand le soir descend
Chante sur ma peine la chanson du sang.

Baisers d'amis, baisers d'homme
Pour la parole que l'on donne,
Pour la parole que l'on tient
Baisers qui seront morts demain.
Baisers de guerre baisers de paix
Avec les fers et puis après
Baisers de mort, baisers vendus
Quelque part au bal des pendus.

Peut-être des centaines, peut-être des milliers
Sûrement des milliards de baisers perdus
Comme des âmes en peine, quand le soir descend
Chante sur ma peine la chanson du sang.

Baisers d'amis ou baisers d'homme,
Pour la parole que l'on donne,
Pour la parole que l'on tient,
Baisers qui seront morts demain.
Baisers de guerre, baisers de paix
Avec les fers et puis après
Baisers de mort, baisers vendus
Quelque part au bal des pendus.

Peut-être des centaines, peut-être des milliers,
Sûrement des milliards de baisers perdus
Comme des âmes en peine, quand le soir descend
Ecoutez madame la chanson du sang.

Baisers donnés, sans qu'on y pense,
A des visages sans importance
Mais pouvant entraîner l'amour
Sans l'intention d'en faire le tour.
Baisers mouillés, baisers vainqueurs
Baisers rouges et baisers moqueurs
Baisers d'écran, baisers faciles
Dans des larmes et puis du style.

Peut-être des centaines, peut-être des milliers
Sûrement des milliards de baisers perdus
Comme des âmes en peine, quand le soir descend
Chante sur ma peine la chanson du sang.

Bernard Lavilliers



mercredi 8 août 2007

Une sorcière comme les autres

Gao Xingjian, La pleine lune, 1997

S'il vous plaît
Soyez comme le duvet
Soyez comme la plume d'oie
Des oreillers d'autrefois
J'aimerais
Ne pas être portefaix
S'il vous plaît
Faîtes vous léger
Moi je ne peux plus bouger

Je vous ai porté vivant
Je vous ai porté enfant
Dieu comme vous étiez lourd
Pesant votre poids d'amour
Je vous ai porté encore
A l'heure de votre mort
Je vous ai porté des fleurs
Je vous ai morcelé mon coeur

Quand vous jouiez à la guerre
Moi je gardais la maison
J'ai usé de mes prières
Les barreaux de vos prisons
Quand vous mourriez sous les bombes
Je vous cherchais en hurlant
Me voilà comme une tombe
Avec tout le malheur dedans

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Celle qui parle
Ou qui se tait
Celle qui pleure
Ou qui est gaie
C'est Jeanne d'Arc
Ou bien Margot
Fille de vague
Ou de ruisseau

C'est mon coeur
Ou bien le leur
Et c'est la soeur
Ou l'inconnue
Celle qui n'est
Jamais venue
Celle qui est
Venue trop tard
Fille de rêve
Ou de hasard

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

Il vous faut
Etre comme le ruisseau
Comme l'eau claire de l'étang
Qui reflète et qui attend
S'il vous plaît
Regardez-moi je suis vraie
Je vous prie
Ne m'inventez pas
Vous l'avez tant fait déjà
Vous m'avez aimée servante
M'avez voulue ignorante
Forte vous me combattiez
Faible vous me méprisiez
Vous m'avez aimée putain
Et couverte de satin
Vous m'avez faite statue
Et toujours je me suis tue

Quand j'étais vieille et trop laide
Vous me jetiez au rebut
Vous me refusiez votre aide
Quand je ne vous servais plus
Quand j'étais belle et soumise
Vous m'adoriez à genoux
Me voilà comme une église
Toute la honte dessous

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Celle qui aime
Ou n'aime pas
Celle qui règne
Ou qui se bat
C'est Joséphine
Ou la Dupont
Fille de nacre
Ou de coton

C'est mon coeur
Ou bien le leur
Celle qui attend
Sur le port
Celle des monuments
Aux morts
Celle qui danse
Et qui en meurt
Fille bitume
Ou fille fleur

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

S'il vous plaît
Soyez comme je vous ai
Vous y rêvez depuis longtemps
Libre et fort comme le vent
S'il vous plaît
Libre aussi
Regardez je suis ainsi
Apprenez-moi n'ayez pas peur
Pour moi je vous sais par coeur

J'étais celle qui attend
Mais je peux marcher devant
J'étais la bûche et le feu
L'incendie aussi je peux
J'étais la déesse mère
Mais je n'étais que poussière
J'étais le sol sous vos pas
Et je ne le savais pas

Mais un jour la terre s'ouvre
Et le volcan n'en peux plus
Le sol se rompt
On découvre des richesses inconnues
La mer à son tour divague
De violence inemployée
Me voilà comme une vague
Vous ne serez pas noyé

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Et c'est l'ancêtre
Ou c'est l'enfant
Celle qui cède
Ou se défend
C'est Gabrielle
Ou bien Eva
Fille d'amour
Ou de combat

C'est mon coeur
Ou bien le leur
Celle qui est
Dans son printemps
Celle que personne
N'attend
Et c'est la moche
Ou c'est la belle
Fille de brume
Ou de plein ciel

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

S'il vous plaît
Faîtes vous léger
Moi je ne peux plus bouger
Paroles et Musique: Anne Sylvestre 1975

vendredi 3 août 2007

Les lèvres rouges


Un de mes films préférés, Les lèvres rouges de Harry Kümel (1970) tourné à Ostende autour de l'hôtel des Thermes avec une superbe Delphine Seyrig en comtesse hongroise vampire. Une atmosphère sensuelle et sulfureuse... Magnifique!
Mais qui s'en souvient?

jeudi 2 août 2007

Angoisse

Gao XINGJIAN
"Angoisse"

2003.
Encre sur papier de riz.


La grande araignée noire est revenue me rendre visite.
Elle m'enserre la poitrine avec ses grandes pattes velues.
Patiente, soigneuse, impitoyable,
Elle tisse son fil poisseux autour de ma solitude.



Full moon


Martine Guisset
Coquelicot


La lune est belle, ronde, lumineuse
Le sang coule lentement
C'est la vie qui s'en va
Indécente et fragile.

C'est la vie qui est là
Au plus profond de moi
Signature clandestine
De ma féminité.